Nature & Environnement
Proposé par Bertrand Morandi, Chef de projet Rhône au Graie
Les sédiments du Rhône façonnent les paysages et la relation des sociétés avec le fleuve. Historiquement, ils constituaient une ressource pour les riverains, mais les aménagements du Rhône ont modifié leur perception. Plus qu’une richesse, ils sont devenus un problème à gérer. Aujourd’hui, indispensables pour la restauration de la biodiversité, ils retrouvent une notoriété.
Une source de richesse pour les sociétés riveraines du fleuve
Les sédiments ont historiquement constitué une richesse pour les activités économiques le long du fleuve. Les alluvions déposées dans la plaine alluviale lors des crues du Rhône jouaient un rôle de fertilisant pour les terres agricoles.
Le fleuve constituait en outre une carrière naturelle et abondante de sables et de graviers utilisés localement pour la construction. Le Rhône a par exemple fourni les matériaux pour l’édification de ses propres digues…
Les extractions dans le lit sont interdites depuis les années 1990 mais les stocks sédimentaires constitués dans la plaine alluviale du fleuve sont encore exploités aujourd’hui.
Les sédiments : des grains de sable dans la mécanique de l’aménagement fluvial
A partir du XIXème siècle, les travaux d’aménagement du fleuve s’intensifient. Il faut dompter le Rhône, aussi bien ses flots que les sédiments qu’ils transportent. Limons, sables, graviers et galets sont devenus un obstacle au développement économique du fleuve.
Les sédiments gênent d’abord le développement de la navigation. Le système de digues et d’épis conçu par l’ingénieur Girardon les piège pour garantir la circulation fluviale et domestiquer le cours du Rhône.
Aujourd’hui encore l’accumulation de sédiments dans les canaux de navigation nécessite des dragages réguliers.
Les sédiments s’accumulent aussi dans les retenues des barrages qu’ils combleraient rapidement sans intervention. Afin de ne pas impacter la production d’électricité, des actions de gestion sédimentaire sont organisées régulièrement.
L’Abaissement Partiel de l’Aménagement de Verbois (APAVER) sur le Haut-Rhône constitue un exemple d’opération réalisée pour permettre le transit des sédiments fins depuis la Suisse et le bon fonctionnement des usines hydroélectriques.
Les flux et les stocks de sédiments, vecteurs de pollutions
Au cours du XXème siècle, le problème de la pollution des sédiments a émergé. La crise des PCB (polychlorobiphényles) est un exemple particulièrement édifiant et médiatisé sur le fleuve Rhône.
Les sédiments fins notamment, participent à la diffusion et au stockage de certains polluants qui se fixent à leur surface.
Ces polluants font l’objet d’un suivi précis dans le cadre de l’Observatoire des Sédiments du Rhône, qui constate une diminution globale des concentrations en contaminants dans les sédiments sur le Rhône.
Indispensable à la biodiversité : le sédiment réhabilité
Les digues et barrages notamment, ont perturbé le transport sédimentaire, la morphologie du lit et la nature des fonds.
Les riverains et acteurs du Rhône avaient appris à gérer les excès de sédiments. Ils sont aujourd’hui confrontés sur plusieurs tronçons du fleuve à des déficits et à une perte de dynamique sédimentaire dus aux aménagements.
Les habitats, comme les lônes, et de nombreuses espèces faunistiques et floristiques sont impactés par ces évolutions.
Depuis quelques années dans le cadre de la restauration du fleuve, des sédiments grossiers sont réinjectés de manière raisonnée dans le lit du Rhône, afin de retrouver une certaine qualité écologique.
La perception des sédiments et de la dynamique fluviale a changé de nouveau, positivement.
Les sédiments du Rhône sont aujourd’hui considérés comme un support important de la biodiversité.
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