Vignes et palmiers
Ici aussi, l’empire romain a créé des vignobles et l’on parle des vétérans installés près de Nîmes après la bataille navale d’Actium (en 31 av. J.-C.) qui vit la victoire d’Octave sur Antoine et Cléopâtre ; les armes de la ville (un crocodile enchaîné à un palmier) en témoignent.
Aujourd’hui à Beaucaire, le Mas des Tourelles reconstitue de manière précise la culture de la vigne et la vinification au temps des Romains.
Il se peut même que la confidentielle AOC Clairette de Bellegarde trouve son origine dans la clairette, cépage antique apporté par des colons du comptoir grec de Rhodanousia (situé sur la commune de Saint-Gilles) …
Le Rhône, la costière et la Méditerranée
La première fortune du vignoble est due à un pèlerinage et à une foire. Le vignoble des Costières de Nîmes (la costière comme disent les géologues) s’élève au-dessus de la Camargue entre deux grands sites : Saint-Gilles et Beaucaire. Comment imaginer aujourd’hui que ces deux villes étaient des ports reliés au commerce méditerranéen ? Leur importance commerciale, égale à celle des grandes foires de Champagne, s’est perdue au fil des siècles.
Pèlerins et marchands
Saint-Gilles alors port d’embarquement pour Rome et la Terre Sainte, se trouvait à l’aboutissement de la voie Regordane, axe prédominant de communication entre Paris, le Massif central, la Méditerranée à l’époque où le Rhône était hors du royaume de France – jusqu’en 1308.
La ville – et l’abbaye des Hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem- doit son nom à Gilles l’Ermite dont elle garde le tombeau. C’était un important lieu de pèlerinage sur la via Tolosana vers Saint-Jacques-de-Compostelle, et sa foire de septembre renforçait son importance économique.
Les vins de Saint-Gilles étaient réputés à l’égal de ceux de Beaune, appréciés par les papes d’Avignon même après leur départ d’Avignon ; le cépage mourvèdre portait alors le nom de plant de Saint-Gilles.
Beaucaire et sa foire
Le vin du Génestet « lou vin dou Genestet que reviscoulo » (qui ravigote), vin de Beaucaire aujourd’hui absorbé par les côtes-du-rhône, abreuva les assiégés de Beaucaire lors de la croisade des Albigeois en 1216.
Mais c’est surtout à sa foire annuelle de juillet, chantée par Frédéric Mistral dans le Poème du Rhône, que Beaucaire, au confluent du Rhône et du Gardon dut sa richesse, et ce jusqu’à l’arrivée du chemin de fer en 1839.
Bienvenue à la foire
Chaque année, le bateau arrivé le premier à la foire de Beaucaire était récompensé ; les consuls de la ville lui donnaient en prix une peau de mouton qui était hissée en haut du mât, un sac de pain et un tonneau de vieux Cante-Perdris, « uno bouto de vièi Canto-Perdris » , un vin de liqueur aromatisé à la cannelle et aux écorces d’orange, issu de cépage grenache.
L’amour de la qualité
Après l’histoire viticole commune (expansion du vignoble, phylloxéra) il faut souligner le rôle d’un haut fonctionnaire, Philippe Lamour (1903-1992).
Chargé de l’aménagement du territoire, il construit un canal, qui porte son nom, afin d’amener l’eau du Rhône vers le sud du Gard et l’est de l’Hérault. L’objectif : « débarrasser le Midi de la tyrannie de la vigne » en permettant, grâce à l’eau, une diversification des cultures.
Pourtant, Philippe Lamour fut un ardent défenseur et promoteur des vins de qualité. Il sera le fondateur des Costières du Gard puis celui de la Fédération nationale des Vins Délimités de Qualité Supérieure (VDQS), et il présidera le Comité régional Languedoc-Roussillon de l’Institut national des appellations d’origine (INAO).
Aujourd’hui en AOC, les Costières de Nîmes comptent des terroirs d’exception : près de Beaucaire, au pied de l’abbaye troglodytique de Saint-Roman qui domine le Rhône, et près de Saint-Gilles, celui de Franquevaux.
