Voies d'échanges

Les épis Girardon, ou la métamorphose du fleuve

Casier Girardon Irigny 1957 © SMIRIL

Les épis ou casiers Girardon, du nom de leur inventeur Henri Girardon (1844-1907, Lyon) sont conçus au XIXe siècle dans un contexte de développement du commerce et de l’industrie avec l’invention du bateau à vapeur et l’essor du chemin de fer. Au final, un chantier considérable, un succès temporaire mais des conséquences durables pour le Rhône. ..

Le Rhône, fleuve instable
Alors que le chemin de fer permet un transport de marchandise fiable et régulier, la navigation sur le Rhône peine à s’exercer, ne serait-ce que la moitié de l’année.
Le fleuve, par son chenal changeant, ses hauts-fonds mouvants et son débit capricieux, ne peut être une alternative envisageable malgré l’invention du bateau à vapeur.

Un premier essai endigué par un manque de fonds …
En 1876, l’ingénieur en chef de la navigation Jacquet, du Service Spécial du Rhône créé par l’État suite aux inondations de 1840, cherche à contrôler les formes du chenal du Rhône en aménageant des épis plongeants et des épis noyés.
Bien que ses travaux s’avèrent concluants, le manque de moyens financiers met fin au projet. En 1884 Henri Girardon reprend les travaux entrepris par son prédécesseur.

Un cadre favorable à la hauteur des travaux
En 1878, à la faveur de la loi Freycinet, l’état va conduire le financement de l’ambitieux projet d’Henri Girardon. Déclarés d’utilité publique,  ces travaux d’une ampleur sans précédent, poursuivent plusieurs objectifs :

  • Réduire la courbe du fleuve qui complique le passage des bateaux,
  • Maintenir une largeur homogène pour favoriser l’écoulement,
  • Obtenir un chenal de navigation d’une profondeur d’au moins 1,6m afin d’être navigable toute l’année.

 

Une nouvelle vision
Si les objectifs demeurent les même que ceux de son prédécesseur, Henri Girardon introduit un aménagement à courant libre qui se veut plus proche des conditions naturelles d’écoulement du Rhône.
L’ingénieur emploie ses connaissances sur l’hydraulique en améliorant notamment l’utilisation des épis et en distinguant deux types de hauts-fonds. Il cherche à remanier les passages défavorables à la navigation en concentrant les eaux du Rhône au centre du chenal, coupant les lônes, ces bras secondaires du fleuve.

Épis et casiers Girardon
Les épis Girardon placés à intervalles réguliers concentrent et régulent l’entrée de l’eau dans le chenal principal. Les épis placés de traverse sont connectés à la berge et à des digues basses. Ils forment des casiers qui en période de crues empêchent la création de courants transversaux. Ces casiers fiabilisent la navigation et permettent au fleuve de creuser naturellement son lit tout en uniformisant son chenal.

Une réussite éphémère …
Le projet d’Henri Girardon s’avère être une réussite puisqu’en 1890 le « chômage des eaux », période de non-navigabilité du Rhône, est réduit à 7 jours par an : En 1887-88 seulement 29 % des seuils du chenal du Bas-Rhône sont inférieurs à 1,60m et le tirage des eaux est suffisant pour le passage des bateaux à vapeur. Ces changements relancent le transport fluvial. Les travaux sur le fleuve dureront une vingtaine d’années.

… pour des bouleversements durables
Mais malgré ces améliorations, les compagnies de navigation ne pourront faire face à la concurrence du chemin de fer soutenu par l’État.
Avec les aménagements Girardon, une nouvelle ère est ouverte sur le Rhône : celle des grands chantiers métamorphosant son cours naturel.

 

  • Epis Girardon a Serrieres © Coll Rondeau BMLyon Promofluiva

    Épis Girardon à Serrières

  • Casier Girardon a Serriere sur Rhone © Jean Michel Olivier

    Casier Girardon à Serrière-sur-Rhône

  • Croquis digues et epis Girardon © Coll Dürenmatt, Promofluvia-BMLyon

    Croquis digues et épis Girardon

  • Casier Girardon Irigny 1957 © SMIRIL

    Casiers Girardon à Irigny 1957