La présence de vignobles sur les voies d’eau, notamment les fleuves navigables, est une constante de l’histoire de la vigne. Le long des 812 km du cours du Rhône, on en distingue douze. Leur personnalité est liée à leur situation géographique, par définition unique, à l’histoire ensuite qui en découle et enfin aux tactiques particulières des vignerons au regard des pentes, des orientations, des sols.
Nous voici dans le canton de Genève dont l’histoire du vin plonge ses racines à l’époque romaine ; à la rencontre de l’héritage du peuple allobroge, qui entre rive droite du Rhône et rive gauche de l’Isère, longtemps contrôla d’importants accès aux Alpes.
Le lointain héritage des Allobroges
Sous l’actuelle cathédrale Saint-Pierre à Genève, construite à l’emplacement d’une sépulture de chef allobroge, ont été trouvées des milliers de coupes à boire, témoignages des rites funéraires du début de notre ère.
Peuple celte devenu gallo-romain, les Allobroges, qui occupaient une partie de l’actuel canton de Genève, savaient cultiver la vigne. Leur capitale était Vienne, en rive gauche du Rhône, à qui on attribue la conduite en hutins présents en bord de Rhône jusqu’à Tain, et la paternité de l’allobrogica. Ce cépage, décrit par Pline l’Ancien et l’agronome romain Columelle, donnait naissance à un vin résineux le « picatum» et serait à l’origine de la syrah et de la mondeuse noire.
Un vignoble important
On le sait peu, le canton de Genève – dont le climat est tempéré par le Léman – est, après ceux du Valais et de Vaud, le troisième de Suisse. Il comprend la plus grande commune viticole suisse, Satigny dont l’origine du vignoble remonterait au Xème siècle de notre ère.
Sur les rives du Léman, entre Arve et Rhône
Entre ville et campagne, presque invisible pour qui traverse le canton par l’autoroute, le vignoble couvre 1 400 ha. Il se caractérise par une grande hétérogénéité de ses sols, entre Arve et Rhône, en rive droite du Rhône et sur les rives du Léman.
Il a de plus la particularité de compter – en sus de ses hectares en territoire helvétique – 120 hectares situés en zone franche : en raison d’accords historiques, ces vignes situées en territoire français et travaillées par des vignerons genevois, donnent des vins en AOC Genève.
Pour une consommation locale
Historiquement, le vignoble de Genève répond aux besoins sans cesse croissants de la ville de Genève et, avant la Réforme (1536), du clergé catholique. Mais pendant longtemps, la culture du vin privilégie la quantité à la qualité, ce que confirme en 1840 à Genève Gérard de Nerval, qui dit préférer boire « notre vin de France » !
Des changements historiques
À la fin du XIXème siècle, phylloxéra et mildiou se répandent de façon foudroyante sur les vignes. La surface du vignoble est réduite à 800 ha en 1918. À cette époque, une importante coopérative assure jusqu’à 80 % de la production cantonale, mais la production reste peu qualitative.
Dans les années 1980, l’organisation et la structure du vignoble change : un grand nombre de vignerons créent leur propre cave avec l’objectif d’un vin de meilleure qualité.
Et une révolution AOC
En 1988 le canton de Genève impose les appellations d’origine contrôlées : une première en Suisse !
L’encépagement se diversifie au-delà du gamay et du chasselas.
Une cuvée emblème est créée en 2004, Esprit de Genève. Un programme de restauration des cabanes de vignes, les capites, est lancé en 2019.
Genève l’internationale !
Depuis 1995, chaque année, le millésime de la Vigne des Nations appartenant à la République et canton de Genève est dédié à une organisation internationale différente.
Quant aux vignerons-encaveurs genevois, héritiers d’une tradition bi-millénaire, ils ont élevé leur vignoble à un niveau international pour une clientèle cosmopolite, à l‘image de la ville Genève.
