Culture & Patrimoine

Le sel et le Rhône, une histoire commune

Proposé par le Centre des monuments nationaux
à partir des recherches de Bénédicte Soumille, chargée d’études historiques

Carte des greniers a sel CMN © Benedicte Soumille et Thierry Roubaud

Au Moyen Âge, le Rhône est une voie privilégiée pour la remonte du sel produit à Péccais, près d’Aigues-Mortes. Ce transport porte le nom de tirage du sel, car les embarcations à fond plat sont tirées depuis les berges à l’aide de la force humaine ou animale.
Certains bateaux peuvent transporter jusqu’à 100 tonnes et livrent les différents greniers à sel situés le long de la vallée du Rhône.

Le grenier à Sel de Villeneuve
Mentionné dès le XVIIe siècle, le Grenier à Sel de Villeneuve est composé d’entrepôts et de boutiques. Il se trouve près de la Porte du Rhône qui donne sur le Port, situé à l’emplacement de l’actuelle Place Charles David. Dans chaque commune, un regrattier s’occupe d’acheter aux greniers à sel une quantité de sel importante pour la revendre au détail dans son village.

La gabelle
Dès 1259, les rois de France imposent lourdement le sel, qui sert entre autres à la conservation des aliments. Un impôt appelé gabelle est perçu au bureau des Fermes du roi et permet le financement des conflits extérieurs. Il multiplie par 20 ou 50 le prix marchand du sel.

Échapper aux droits de douane
Les marchandises sont lourdement imposées côté français alors que sur l’autre rive du Rhône, dans le Comtat Venaissin appartenant au Pape depuis 1274, les prix sont moins élevés. Plusieurs édits royaux interdisent l’importation du tabac, de la soie et des tissus d’indiennes du côté français. La différence de prix entre les deux rives entraîne des faits de contrebande. Pour ne pas payer les droits de douanes, les contrebandiers introduisent les marchandises clandestinement en France.

Enrayer la contrebande, une mission difficile
En 1730, le long de la vallée du Rhône, 26 postes de gardes sont positionnés pour abriter les sentinelles des fermiers généraux et de la Compagnie des Indes afin de lutter contre la contrebande. Mais en 1762, le bureau de Laudun l’Ardoise est attaqué par 32 contrebandiers qui volent l’argent de la douane et les fusils des employés.
Ce système de surveillance est cependant efficace : un certain Lanet, compagnon de Mandrin, célèbre contrebandier du XVIIIe siècle, qui achète des marchandises en Suisse et les revend sans payer les taxes dues en France, est capturé. Arrêté à Villeneuve, peut-être a-t-il connu les prisons du Fort Saint-André ?

Le trafic de sel ou faux saunage
Le Fort a abrité des prisons depuis le Moyen Âge jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, avec des périodes d’inoccupation.
D’après les listes de prisonniers du XVIIIe siècle, on apprend l’emprisonnement de trois femmes pour faux-saunage. Grâce aux archives, elles ont été identifiées : Jeanne Trasale et Marie Counaire ont été enfermées en 1769 et Jeanne Bourette en 1776 ; la durée de leur peine encourue a été d’un mois de prison.

  • Carte des greniers a sel CMN © Benedicte Soumille et Thierry Roubaud

    Carte des greniers à sel – Centre des Monuments Nationaux

  • Un pecheur calfate son bateau recadre ©Rmoorlag - CC BY 3

    Un pêcheur calfate son bateau – photo recadrée

  • Affiche exposition Rhone fort Saint Andre

    Affiche de l’exposition « un fort, un fleuve, le Rhône »

  • Plan de Villeneuve lez Avignon du fort Saint Andre et de la tour du pont Source gallica.bnf.fr BnF

    Plan de Villeneuve lez Avignon du fort Saint-André et de la tour du pont

  • Le fort Saint Andre vu depuis le Rhone CMN © Camille Moirenc

    Le fort Saint-André vu depuis le Rhône