Crozes-Hermitage
L’appellation Crozes-Hermitage (du nom du village de Crozes, commune fruitière et viticole au nord de Tain) s’étend sur près de 1 800 hectares en rive gauche, de Serves-sur-Rhône jusqu’à la confluence de l’Isère avec le Rhône. Le cépage roi est la syrah mais quelques vins blancs sont également produits.
La Table du Roi
Au nord de Tain et Tournon, comme posé au milieu du Rhône, se trouve le rocher de la Table du Roi. Avant la navigation à vapeur, le roi des mariniers offrait à boire sur ce haut-fond, écrit Frédéric Mistral dans Le Poème du Rhône : « Le chef et maître est à califourchon sur le petit tonneau plein, au milieu de la table, et la main sur le robinet, fait jaillir dans la tasse de chacun le vin jovial qui brille au soleil. »
La colline légendaire
La colline de l’Hermitage fait partie des reliefs remarquables du vin, comme le piton de Sancerre, Château-Châlon, ou le mont Brouilly.
C’est sans doute l’un des plus beaux balcons de vignes. Orienté plein sud, le site est idéal pour admirer la lumière du Rhône, le fleuve qui a tranché sur son passage l’extrémité est du Massif Central et de ses sols granitiques.
La colline, dit-on, doit son nom au chevalier Henri-Gaspard de Stérimberg, qui au début du XIIIe siècle, fatigué de la croisade contre les Albigeois, se retira au sommet. Il fit bâtir une chapelle et cultiva la vigne, offrant son vin aux pèlerins, d’où l’origine du vignoble l’Hermitage.
Bien plus sûrement, Gaulois et Romains y ont cultivé avant lui de la vigne et certainement le fameux vin de paille.
Un vin prestigieux inégalé
En tout cas, cette appellation, nous dit Boileau en 1663 (Le repas ridicule), était assez prestigieuse pour être copiée :
« Un laquais effronté m’apporte un rouge bord,
D’un Auvergnat fumeux qui, mêlé de lignage,
Se vendait, chez Grenet, pour vin de l’Hermitage
Et qui rouge et vermeille, mais fade et doucereux,
N’avait rien qu’un goût plat et qu’un déboire affreux. »
Diversité des sols, noms évocateurs
Sur 130 hectares, une vingtaine de lieux-dits, reflets de la diversité des sols, s’égrènent dans l’architecture des terrasses et des murets : L’Hermite et La Chapelle, Chante Alouette, L’Homme, La Croix, les Bessards, les Doignières …
Rien d’étonnant en ce que la coopérative de Tain, le vigneron-négociant la Maison M.CHAPOUTIER et quelques vignerons brillants en aient fait leur capitale devenue aujourd’hui une destination œnotouristique.
Une fierté pour la commune de Tain qui ajouta à son nom « L’Hermitage » en 1920 !
Sur l’autre rive
En rive droite, Tournon, dont le château abrite aujourd’hui un musée du Rhône, doit sa prospérité à la vigne et au vin expédié par son port. Son nectar est célébré par Hugo dans Le mariage de Roland :
« L’homme a vu le vieux comte ; il rapporte une épée
Et du vin, de ce vin qu’aimait le grand Pompée
Et que Tournon récolte au flanc de son vieux mont. »
Des vins de Mauves…
Au Moyen Âge, les vins de Mauves, du nom du village au sud de Tournon, sont célèbres jusqu’à Paris. Ils sont cités par Hugo, au début de son roman Les Misérables paru en 1862, lorsque l’évêque de Digne en sert à Jean Valjean : « Mon frère lui faisait boire de ce bon vin de Mauves dont il ne boit pas lui-même parce qu’il dit que c’est du vin cher. »
… au Saint-Joseph
Rebaptisés en Saint-Joseph au XVIIème siècle par les Jésuites, ces vins conserveront leur appellation lors de la reconnaissance en AOC en 1956, en dépit du souhait du baron Le Roy, président de l’INAO, de choisie le nom de Tournon.
Car la réputation du cru de Saint-Joseph était telle, que l’appellation fut conservée.
Près de 1 200 hectares en guirlande façonnent aujourd’hui le paysage sur soixante kilomètres en rive droite du Rhône, de Chavanay à Guilherand-Granges. Les meilleurs coteaux sont exposés est et sud-est, notamment sur les flancs des petites vallées des affluents du Rhône, comme le Doux.